Un peu trop libre …

A partir de 1986, Joukhadar se libère même de la tyrannie de ses impulsions artistiques ! Il abandonne ses pinceaux et se consacre entièrement à des recherches commencées en 1974 portant en particulier sur les hautes mathématiques ainsi que sur la géométrie et l’architecture. Il confronte ses connaissances, à partir de 1980, lors de longs voyages, à celles de spécialistes mondiaux (Keith Kritchlow à Londres, S.H. Nasr à Washington, Fred Donner de l’Université de Chicago, Christophe Richard professeur agrégé en Mathématiques de l’École Normale Supérieure à Paris et le professeur Bessarab Nicolescu au CNRS, etc.).

Les recherches mathématiques associées à la physique moléculaire l’amènent à des questions presque métaphysiques dans le domaine des nombres, questions similaires à celles qui préoccuperont Elia Perogine ou Stephan Hawking. Le sujet de ces recherches étant si complexe à exprimer, il s’est résigné à en transcrire certains thèmes dans des ouvrages où diagrammes et illustrations remplacent complètement la parole, à l’instar du Mutus Liber, dont le sujet lui est par ailleurs familier.

Ses recherches ne l’empêchent pas de s’engager activement dans la sauvegarde de savoirs traditionnels et de contribuer également à la restauration de monuments Mamelouks, Ayyubides et Romains.

Il se voit également amené à restituer la vérité sur des questions historiques et artistiques. En revoyant les strates d’idées préconçues accumulées au cours des siècles sur Pythagore et Fibonacci, en révisant certaines œuvres de Liszt ou Tchaikovski, ou en établissant définitivement l’identité de la célèbre Joconde du Louvre, la même méthodologie est toujours à l’oeuvre : l’application de la Gestalt et une reprise à zéro systématique de tous les éléments de l’enquête comme lors de la réouverture d’un procès devant une Cour de Cassation.

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En 1993, entouré d’un groupe d’architectes, il réalise plusieurs complexes d’habitation et conçoit particulièrement deux édifices basés sur les critères de l’architecture sacrée.

Toutes ses occupations, en apparence hétéroclites, convergent en réalité, autour d’une conviction : l’esthétique, dans les profondeurs de ses manifestations, n’est qu’une. L’essence esthétique que ce soit celle des nombres, d’une architecture sacrée, ou d’une étude de concert est une, abstraction faite du vecteur utilisé.

Joukhadar se réfère à un documentaire sur la Plisetskaya pour illustrer cette idée : « J’étais absorbé, voire hypnotisé, par la grâce et le raffinement esthétique du mouvement de ses bras métamorphosés en ondes fluides. Peu après j’ai écouté un sublime morceau interprété par Claudio Arrau. Sous le charme de la Plisetskaya, ma conscience esthétique s’était affinée, mon niveau d’exigence s’était élevé. L’interprétation d’Arrau que j’avais toujours considérée quasi parfaite, laissait désormais à désirer. »

Dans l’essence, les barrières entre visuel, acoustique et abstrait disparaissent.

S. Joukhadar

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